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Le témoignage de Kaitlyn Lawes

  le 15 juin, 2020

Je m’appelle Kaitlyn Lawes. Certains d’entre vous me reconnaîtront peut-être… Je suis une double médaillée d’or olympique en curling. Mais ce que beaucoup d’entre vous ne connaissent pas, c’est l’histoire de mon père.

J’échangerais tous mes succès sportifs en un clin d’œil, si cela me permettait d’avoir plus de temps avec mon père.

Le 3 novembre 2007, notre cœur s’est brisé lorsque nous avons dit au revoir à mon père, Keith Lawes. J’étais sa petite fille et il était mon fan numéro 1 et mon plus grand supporteur. Le regarder prendre son dernier souffle fût le jour le plus difficile de ma vie.

Mon père est né et a grandi à Montréal, au Québec. Lui et ses frères et sœurs étaient des Canadiens de première génération, ses parents avaient immigré au Canada en provenance de l’Angleterre.

Papa devait se déplacer beaucoup pour son travail au sein une société de fiducie. Mais, en 1986, mon père, ma mère (Cheryl) et mon frère (Kevin), ont déménagé d’Ottawa, en Ontario, à Winnipeg, au Manitoba, où ils se sont installés dans notre maison familiale.

Deux années plus tard, je me joignais à ma magnifique famille.

À mon premier anniversaire de naissance, mon père prit sa retraite et ma mère retourna travailler à temps plein au sein du gouvernement fédéral. Papa est ainsi devenu ce qu’il appelait « Monsieur Maman » et il appréciait beaucoup d’être un papa à la maison. Je suis sûre qu’il lui a probablement fallu une période d’adaptation au cours des premières années, mais d’après mes souvenirs, il était un excellent papa à la maison. Nous avons été très chanceux de l’avoir à la maison pendant toutes ces années.

Papa nous emmenait, mon frère et moi, à l’école, il nous a préparait de délicieux dîners et nous emmenait à toutes nos activités. Nous passions nos étés à camper dans notre petite tente roulotte verte de 14 pieds, à pêcher, à faire du vélo ou du patin à roues alignées, et à voyager partout au Canada afin de visiter notre famille.

J’ai dû hériter mon amour pour le sport de mon père, car il était un athlète exceptionnel dans sa jeunesse. Au lycée, il était capitaine de l’équipe de football, de l’équipe de hockey et de l’équipe de golf. Ce n’est qu’à l’âge de 30 ans que son amour pour le curling a commencé, il avait une véritable passion pour ce sport et il a joué jusqu’à ce qu’il soit très malade.

Mes deux parents nous ont encouragés, mon frère et moi, à participer à autant de sports que nous le souhaitions. À ce jour, j’en suis très reconnaissante.

Papa a joué au sein de diverses ligues seniors, ainsi qu’au sein d’un ligue mixte tous les vendredis avec ma mère. Cela signifiait que, pendant mes jours de congé, je suivais papa à la patinoire de curling. Après ses matchs, je lui demandais de m’emmener sur la glace pour m’entraîner avec lui.

Un soir de 2006, nous étions en train de souper tous ensemble dans la véranda à la maison.

Papa parlait, puis soudain il commença à dire des choses qui ne faisaient aucun sens.

Il regarda au loin, puis lorsqu’il revint à lui, il ne réalisa pas ce qui s’était passé. Maman se doutait que quelque chose n’allait pas, et ils prirent donc rendez-vous avec son médecin le plus rapidement possible.

Plusieurs tests plus tard, il a reçu un diagnostic qui a changé sa vie et nos vies pour toujours. Je n’oublierai jamais ces mots, « tumeur cérébrale ».

La chirurgie était prévue pour le début 2007, mais à Noël 2006, la situation empirait rapidement et ils ont devancé la chirurgie au début janvier.

Je devais jouer au curling dans le championnat provincial junior durant sa chirurgie. Je voulais être à l’hôpital avec mon père, mais il m’a dit d’aller jouer, qu’il irait bien. Alors je l’ai écouté.

Mes coéquipiers et leurs familles m’ont beaucoup soutenue pendant cette période émouvante. Je ne voulais rien de plus que gagner pour lui. Il est sorti de la chirurgie et m’a rapidement appelé pour voir comment j’allais. J’étais tellement soulagée.

Nous avons perdu la finale provinciale cette année-là et j’étais complètement dévasté. Je pensais avoir laissé tomber mon père. Il s’en fichait, il était juste fier de moi, que j’ai pu traverser des moments aussi difficiles.

Nous pensions que les choses étaient revenues à la normale. Papa était redevenu actif après l’opération, et les choses semblaient bien aller. Le chirurgien nous a dit qu’il n’était pas en mesure de retirer toute la tumeur, car une partie s’était infiltrée autour de sa moelle épinière. Cependant, la tumeur avait probablement été là pendant des années, et il était possible qu’elle reste dormante, mais il y avait également une possibilité qu’elle revienne de manière agressive.

Nous espérions le meilleur et prenions la situation au jour le jour.

En mai 2007, notre plus grande crainte est devenue réalité. Les yeux de papa ont commencé à le déranger, alors il est allé consulter un optométriste. Ce dernier lui a conseillé de retourner chez le médecin dès que possible. La tumeur cérébrale était de retour, et cette fois pour de bon. Une deuxième intervention chirurgicale était prévue en juillet pour nous « donner du temps » avec papa. Malheureusement, suite à des complications après l’opération, papa a dû rester à l’hôpital pendant plus d’un mois. Chaque jour, nous allions à l’hôpital pour passer autant de temps que possible avec lui. Nous avons finalement pu le ramener à la maison en août en soins palliatifs.

Nous avons célébré le dernier anniversaire de papa avec lui le 15 octobre, il a malheureusement perdu sa bataille contre cette terrible maladie le 15 octobre 2007.

Kaitlyn Lawes and her father,

J’avais 18 ans. J’étais perdue, en colère, effrayée, émotive, dévastée et j’avais le cœur brisé. J’ai ressenti toutes ces émotions pendant de nombreuses années après son décès.

À l’époque, j’ai contemplé abandonner le curling, mais heureusement, grâce au soutien de ma famille et de mes coéquipiers, je ne l’ai pas fait. Ma carrière a décollé après le décès de papa. Nous avons finalement remporté le championnat provincial junior deux mois seulement après son départ.

Nous avons ensuite remporté deux championnats canadiens juniors consécutifs et obtenu une médaille de bronze et d’argent au championnat du monde.

Honnêtement, je ne me souviens pas vraiment de ces championnats.

J’étais triste, et je devais faire face aux médias qui me posaient constamment la même question :

« Félicitations pour ta victoire. Ton père est décédé, comment te sens-tu? »

Je m’effondrais dès que quelqu’un me posait des questions sur mon père. Je suis sûre que tous les journalistes au Canada m’ont vu pleurer. C’était cruel de me demander cette même question pendant tant d’années.

Ce qui rendait cette situation si déchirante, c’est que j’aurais fait n’importe quoi pour partager ces expériences avec mon père.

Cela fera 13 ans en novembre que mon père est décédé, et ce n’est pas devenu plus facile d’en parler. J’ai fait d’innombrables présentations et discours post-olympiques où je raconte une partie de mon histoire, comment j’ai surmonté les obstacles, transformé les défis en opportunités, etc. Toutefois, je réalise en écrivant mon histoire que les souvenirs de mon père génèrent encore beaucoup d’émotions et de tristesse chez moi.

Je pense que d’une manière ou d’une autre, nous continuons à pleurer la perte de nos proches, peu importe le nombre d’années. Ce qui me fait encore plus mal maintenant, c’est de penser à la douleur que ma mère a dû traverser, en essayant d’être forte pour ses enfants alors qu’elle devait faire face à sa propre tristesse.

Elle est la femme la plus forte que je connaisse et je lui suis très reconnaissante pour son soutien à travers toutes les étapes de ma vie.

J’espère qu’en partageant mon histoire par le biais de la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales je démontrerai aux personnes qui sont touchées par la maladie qu’elles ne sont pas seules dans cette bataille. J’espère aider à créer une prise de conscience collective afin que nous puissions trouver un remède et que plus personne n’ait à traverser ce que ma famille a dû traverser.

Joignez-vous à Kaitlyn le 27 juin prochain pour notre #MarcheTumeursCérébralesVirtuelle.