L’histoire de Michèle Tirlemont
En 2008, à l’occasion d’un scanner de la tête effectué pour un problème de cordes vocales, on a découvert, de manière fortuite, que j’avais un méningiome d’assez petite taille. Un méningiome est une tumeur cérébrale, en principe non cancéreuse (dans environ 95 % des cas). Le médecin vu aux Îles-de-la-Madeleine où je vivais alors, m’a tout de suite rassurée en me disant que ce n’était rien, que cela ne grossirait sûrement pas, que beaucoup de gens en avaient sans le savoir et sans que cela ne pose jamais de problème, et que j’allais juste être suivie par IRM tous les deux ans de manière préventive. Ce qui fut fait, régulièrement.
À un moment donné, le méningiome a commencé à grossir doucement, sans pour autant inquiéter. Jusqu’en mai 2015 où, après une nouvelle IRM de contrôle passée seulement un an après la précédente (au lieu de deux ans), et suite à la reprise de mon dossier par un nouveau neurochirurgien à Montréal où j’étais revenue vivre quelques mois auparavant, il s’est avéré que la tumeur s’était mise à grossir de manière beaucoup plus évidente et rapide. Il a alors été décidé de m’opérer pour la retirer avant qu’elle ne cause de dégâts. Quelques mois plus tard, en pleine forme, j’ai décidé de donner au suivant en devenant bénévole pour la fondation. En avril 2016, j’ai commencé à animer un groupe de soutien virtuel francophone (par internet et/ou téléphone), le premier à être créé au Canada. Le groupe se réunit le mardi, toutes les deux semaines.
En 2008, lorsque l’on m’a annoncé que j’avais un méningiome, le médecin a tellement voulu me rassurer que, peut-être aussi par déni, je ne me suis pas réellement inquiétée. Le moment véritablement le plus effrayant a été lorsque, en mai 2015, mon neurochirurgien qui avait commencé à me suivre à Montréal depuis mon retour dans la métropole, m’a annoncé, après une nouvelle IRM de contrôle, que ma tumeur s’était mise à grossir brutalement et rapidement. La chirurgie était indiquée. Ma vie n’étant pas immédiatement menacée, la décision finale me revenait. C’est ce jour-là que j’ai réellement éprouvé un vrai choc. D’un seul coup, dans mon esprit, je n’avais plus juste un « méningiome », mais bien une « tumeur au cerveau ». Une expression que j’avais jusque-là pris soin d’éviter, probablement par déni. L’idée qu’on allait m’ouvrir le crâne me terrifiait, littéralement. Ce moment et les jours qui ont suivi jusqu’à l’opération ont été extrêmement stressants. Finalement, ma chirurgie a eu lieu le 2 juillet 2015, soit environ un mois et demi plus tard. Les minutes qui ont précédé mon anesthésie ont été parmi les plus terrifiantes de ma vie.
On pense toujours que les mauvaises choses n’arrivent qu’aux autres jusqu’au jour où la vie nous rattrape, tout simplement parce que nous sommes tous humains et que la maladie fait partie de la vie. J’ai bénéficié d’un excellent suivi préventif après la découverte fortuite de ma tumeur. C’est un formidable espoir pour toutes les personnes recevant un diagnostic de tumeur cérébrale. J’ai eu beaucoup de chance même si j’ai traversé des moments difficiles. Le diagnostic a changé ma vie dans le sens où j’en suis sortie plus forte et audacieuse face à la vie en général. « J’ai survécu à une tumeur cérébrale, je peux faire ça ! ». Le diagnostic et tout le cheminement qui a suivi, en particulier l’opération, réussie, m’ont donné envie de « donner au suivant » et de sensibiliser le public à la question des tumeurs cérébrales. Je souhaite aussi porter un message d’espoir car tout s’est bien passé pour moi et je vis très bien aujourd’hui, sans aucune séquelle.
J’aimerais que les gens comprennent ce que sont les tumeurs cérébrales. C’est une question complexe car il existe un grand nombre de tumeurs différentes. Bien sûr, les tumeurs cérébrales cancéreuses sont terribles car dès que l’on parle de cancer, on connaît les implications et les risques. Cependant, je voudrais que les gens sachent que de très nombreuses personnes sont aussi touchées par des tumeurs cérébrales non malignes qui, pour n’être pas cancéreuses, n’en sont pas moins dévastatrices potentiellement, et peuvent avoir un lourd impact sur la qualité de vie des gens, et nécessiter également une chirurgie, et parfois des traitements lourds comme de la radiothérapie, de la chimiothérapie, etc. C’est pourquoi j’aimerais que l’on fasse attention à ne plus dire « tumeur bénigne » pour désigner une tumeur cérébrale non cancéreuse, car une tumeur cérébrale, même non maligne, n’a absolument rien de « bénin » . Les mots ont leur importance.
En ce qui concerne mon parcours personnel, j’aimerais que l’on retienne le fait que j’ai bénéficié d’un excellent suivi préventif, et que mon neurochirurgien a fait un excellent travail en souhaitant m’opérer avant que ma tumeur ne fasse des dégâts puisqu’il était évident qu’elle s’était mise soudainement à grossir de manière exponentielle et rapide. Aussi, je voudrais dire toute ma reconnaissance aux neurochirurgiens en général qui ont fait ce choix de carrière, et qui ont la force mentale et la dextérité nécessaires, après de nombreuses années d’études, pour ouvrir le crâne des gens et de travailler sur leur cerveau. Enfin, je voudrais souligner le travail accompli, souvent dans l’ombre, par la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales qui soutient la recherche et qui vient en aide aux personnes touchées et à leur entourage, en particulier grâce aux manuels d’informationqu’elle offre gratuitement à quiconque en fait la demande, et grâce aux groupes de soutien offerts, qu’il s’agisse de groupes de soutien en personne ou de groupes de soutien en ligne et/ou par téléphone, destinés aux patients eux-mêmes ou aux aidants.