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Le legs de Rebecca : changer les choses, une voix à la fois

  le 28 avril, 2025

Rebecca Grundy croyait qu’elle pouvait changer les choses en faisant entendre sa voix.

Elle œuvrait à titre de lobbyiste auprès du gouvernement pour le Parti progressiste-conservateur de l’Ontario tout en menant une brillante carrière en relations publiques et en communication. Dans ce domaine, elle a travaillé sur des campagnes pour Rethink Breast Cancer et a fait pression pour que le dispositif Optune de Novocure, un système portable pour le traitement du glioblastome, soit commercialisé au Canada.

Elle était au sommet de sa carrière, partageait sa vie avec Tano, l’homme qu’elle aimait depuis longtemps, et menait une vie active. Nageuse synchronisée depuis l’âge de sept ans, Rebecca aimait être dans la piscine avec ses coéquipières du Toronto Synchro Club. Elle aimait également profiter du plein air, que ce soit pour faire du vélo ou camper.

Un changement soudain

De l’avis de tous, Rebecca se portait à merveille. Rien ne laissait présager un quelconque problème de santé, jusqu’à ce qu’elle soit victime de trois crises d’épilepsie généralisées successives alors qu’elle se trouvait chez une amie. Elle s’est réveillée à l’hôpital, où les médecins lui ont annoncé qu’une tumeur non maligne avait été détectée dans le lobe frontal gauche de son cerveau.

Rebecca a subi une intervention chirurgicale à l’hôpital général de Toronto un mois plus tard, où elle a appris qu’elle était en fait atteinte d’un glioblastome.

« C’était tout simplement un choc horrible » raconte Angela Grundy, la mère de Rebecca. « C’est à ce moment-là qu’un long cheminement a commencé. »

Le traitement de Rebecca a débuté par des séances de radiothérapie et la prise de témozolomide, une chimiothérapie administrée par voie orale. En Ontario, les traitements administrés par voie intraveineuse à l’hôpital étaient financés en totalité, tandis que les traitements sous forme de comprimés pris à domicile n’étaient généralement couverts que pour les personnes âgées de 65 ans ou plus (source: ministère de la Santé de l’Ontario). Les patients plus jeunes, comme Rebecca, alors âgée de 28 ans, étaient souvent confrontés à des retards, à des difficultés administratives et à des frais non remboursés.

Le fait de devoir franchir des obstacles administratifs pour obtenir les médicaments nécessaires, tout en récupérant d’une opération au cerveau, constituait une source de stress supplémentaire. Rebecca trouvait injuste qu’elle et d’autres personnes se trouvent dans cette situation.

De patiente à défenseuse des droits

Elle s’est impliquée auprès de la Coalition CanCertitude, qui regroupe plus de 30 groupes de patients atteints de cancer au Canada, afin de sensibiliser les décideurs politiques de l’Ontario à la nécessité d’un accès équitable et égal aux traitements contre le cancer. Ses efforts ont contribué à obtenir l’engagement de tous les partis politiques à remédier à ces disparités.

Rebecca a également participé à des activités de collecte de fonds par l’intermédiaire du Gerry and Nancy Pencer Brain Tumor Centre, au sein du Princess Margaret Cancer Centre de Toronto, en créant une équipe appelée les Glioblasters pour la marche ou la course « Journey to Conquer Cancer » organisée par l’organisation.

« Je pense qu’elle a recueilli près de 50 000 dollars au cours des années où elle a constitué son équipe », explique Angela, ajoutant que Rebecca faisait aussi partie du conseil d’examen des patients de l’hôpital.

Trouver le juste équilibre entre le traitement et l’impact

Tout en militant en faveur d’un changement pour les patients atteints de cancer et en composant avec son propre diagnostic, Rebecca a également repris son travail de lobbyiste auprès du gouvernement. Elle a continué à travailler jusqu’à ce que sa tumeur récidive en 2022, ce qui l’a obligée à subir une nouvelle intervention chirurgicale et à prendre du recul par rapport à ses engagements professionnels.

« Elle a décidé de prendre du temps pour elle et de faire ce qu’elle avait envie de faire », raconte Angela.

Cela signifiait se consacrer à ses loisirs, comme la nage synchronisée, et passer du temps avec sa famille, ses amis et le chien que Tano, avec qui elle s’était fiancée en septembre 2023, lui avait offert alors qu’elle était sur le point de terminer sa première série de séances de radiothérapie.

Angela se souvient de la réaction de Rebecca lorsqu’on lui a offert son chien, Cardi : « Elle a dit : « Comment suis-je censée m’occuper d’un chien? Je ne suis même pas capable de m’occuper de moi. » » « Mais il s’est avéré que Cardi était un excellent compagnon pour Rebecca. »

Pendant ce temps, Rebecca continuait à souffrir de maux de tête liés à certaines positions et ses scans montraient que sa tumeur recommençait à grossir. Elle a subi une troisième intervention chirurgicale en 2023, réalisée par la même médecin qui avait pratiqué les deux précédentes, la Dre Gelareh Zadeh.

« Cela la réconfortait de savoir que c’était la Dre Zadeh qui pratiquait toutes ses interventions chirurgicales », explique Angela.

Au printemps 2024, les résultats de l’IRM de Rebecca ont révélé une nouvelle croissance tumorale. Comme la tumeur se trouvait à un endroit légèrement différent de la fois précédente, on a recommandé d’avoir recours à la radiothérapie.

« À partir de ce moment-là, elle a commencé à avoir des crises d’épilepsie environ une fois par mois », explique Angela. « Puis, elles sont devenues plus fréquentes, et elle a recommencé à souffrir de maux de tête liés à la position. Lors d’une nouvelle IRM, on n’a pas observé de changements significatifs dans le lobe frontal gauche, mais une nouvelle croissance tumorale a été détectée au niveau du chiasma optique. »

La nouvelle croissance tumorale affectait la vision de Rebecca, qui a donc subi une quatrième intervention chirurgicale en novembre 2024. Les médecins ont pu retirer une partie de la tumeur dans son lobe frontal gauche, mais n’ont pas pu atteindre la nouvelle croissance.

Angela, qui vivait près de London, en Ontario, avait emménagé chez Rebecca à Mississauga, en Ontario, pour l’aider à se remettre de sa dernière opération. Rebecca souffrait d’une faiblesse du côté droit et avait de la difficulté à parler. Elle a donc commencé à suivre des séances de physiothérapie et d’ergothérapie à l’Institut de réadaptation de Toronto. Elle n’avait commencé que depuis une semaine et demie lorsqu’on lui a annoncé qu’elle devait reprendre la radiothérapie.

Comme elle ne pouvait pas poursuivre simultanément sa réadaptation et ses traitements de radiothérapie, Rebecca a choisi de se concentrer sur la radiothérapie.

« C’est à ce moment-là que les médecins ont dit : « Vous devez réfléchir à ce que vous voulez faire si les choses ne s’améliorent pas » », se souvient Angela.

Après une autre crise d’épilepsie, Rebecca a été admise à l’hôpital Toronto Western, avant d’être transférée à l’unité de soins palliatifs de l’hôpital Princess Margaret. Rebecca a pu y rester pendant une courte période, mais elle devait décider où elle voulait aller pour s’installer à long terme. Elle a choisi le centre de soins palliatifs Sakura House, à Woodstock, en Ontario, car il était proche de l’endroit où elle avait grandi et où vivait sa famille.

Entretenir l’espoir

« Elle n’a jamais perdu espoir », explique Angela. « Elle s’est battue jusqu’au bout. Elle était déterminée à aller mieux d’une manière ou d’une autre. Son oncologue lui a dit à plusieurs reprises que les résultats des IRM n’étaient pas encourageants et qu’elle devrait envisager de profiter pleinement de la vie et de faire ce qu’elle souhaitait, mais elle n’a jamais voulu abandonner. Elle était une battante. »

Jusqu’à sa dernière intervention chirurgicale, Rebecca suivait des cours de F45, un entraînement par intervalles à haute intensité (HIIT). Elle cultivait ses propres légumes, mangeait bio, essayait tout ce qu’elle pouvait pour retrouver la santé.

Elle portait également le dispositif Optune, qu’elle avait aidé à faire connaître au Canada, sans se douter qu’ironiquement, elle en aurait besoin un jour.

« Ce genre de choses était tout simplement surréaliste », dit Angela. « Elle militait sans relâche pour améliorer la vie des autres, et il s’est avéré qu’elle avait besoin de l’appareil pour lequel elle avait tant milité. »

Faire preuve de détermination

Angela se souvient d’une journée passée à Sakura House, où elle et son mari Kevin ont emmené Rebecca à l’extérieur en fauteuil roulant, et où Rebecca a défait sa ceinture, prête à aller marcher.

« Elle pouvait à peine tenir debout à ce moment-là, raconte Angela, mais elle était déterminée : « Je vais le faire. » » C’était une femme très intelligente, et elle savait qu’elle perdait peu à peu la vue, la parole et sa mobilité. Mais elle était déterminée. Elle n’a jamais abandonné. »

Angela raconte qu’elle a dû aborder avec Rebecca des sujets difficiles, notamment ses volontés dans l’éventualité de son décès. Rebecca souhaitait que ses funérailles aient lieu à la North Park Community Church de London, que sa sœur Christina, âgée de seulement 16 mois de plus qu’elle, fréquentait avec leurs parents. Elle a ensuite exprimé le souhait qu’on organise une fête.

L’empreinte durable de Rebecca

Lorsque Rebecca est malheureusement décédée le 3 janvier 2025, c’est exactement ce qui a été fait. Une fois la cérémonie religieuse terminée, sa famille et ses proches se sont retrouvés au London Music Hall pour célébrer sa vie.

« C’était un bel hommage à sa mémoire », dit Angela.

Même après son décès, Rebecca a posé un geste qui a eu un impact considérable en faisant don de son corps à la science. Son désir d’aider les autres était si fort qu’elle a demandé que son cerveau soit étudié dans le cadre du programme de recherche dirigé par la neurochirurgienne Dre Sheila Singh et que son corps soit offert à la formation des futurs professionnels de la santé.

« Elle avait toujours à cœur le bien-être des autres », dit Angela. « Quand les gens lui rendaient visite, elle leur demandait : « Qu’est-ce qui se passe dans ta vie? Ça va comme tu veux?  Est-ce que ça va? Les gens venaient la soutenir, mais elle continuait de vouloir soutenir les autres. C’était tout simplement comme ça qu’elle était. »

En hommage à Rebecca

Rebecca a laissé derrière elle un héritage marqué par la force, la compassion et des changements significatifs, qui a été salué par de nombreuses personnes. En plus des hommages qui ont afflué après son décès, Rebecca a reçu un honneur posthume : le « PC Party’s Outstanding Campaign Manager Award for rookie campaign managers » [le prix d’excellence en gestion de campagne pour les nouveaux gestionnaires de campagne du Parti conservateur] a été rebaptisé « Rebecca Grundy Award for Outstanding Campaign Management (Rookies) » [Prix Rebecca Grundy pour l’excellence en gestion de campagne (nouvelles recrues)].

La Fondation canadienne des tumeurs cérébrales tient également à souligner les efforts déployés par Rebecca pour faire avancer la recherche sur les tumeurs cérébrales et améliorer l’accessibilité aux traitements, ainsi que pour avoir agi là où elle estimait que cela était nécessaire. Rebecca était une personne réfléchie, déterminée et pleine de conviction, qui a laissé le monde dans un meilleur état grâce à ses contributions.

Rebecca était membre de notre comité de défense des droits, qu’elle a rejoint en mars 2023. Elle assistait à toutes les réunions avec le sourire et une attitude positive, quels que soient ses problèmes personnels ou les sujets difficiles abordés.

Sarah Rogers, responsable de la défense des droits et de l’information à la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales, se souvient d’une réunion avec le Comité d’expertise en gestion des listes des médicaments assurés (CEGL) de l’Agence canadienne des médicaments (ACM) plus tard cette année-là, où les patients avaient été invités à faire part de leur point de vue.

Lors de la réunion, Rebecca a parlé des traitements qu’elle avait suivis et des difficultés qu’elle avait rencontrées pour défendre ses intérêts et sa santé. Elle a mentionné l’importance d’avoir accès à des options de traitement, car cela donne de l’espoir aux patients et à leurs familles, ce qui est essentiel à leur qualité de vie.

« À la suite de cette réunion et des préoccupations soulevées par Rebecca, l’AMC a émis une recommandation favorable au remboursement du traitement, ce qui signifie que les coûts seront pris en charge et que les patients n’auront pas à subir de délais ou à se voir refuser l’accès au traitement », explique Sarah. « Nous devons attribuer ce succès à la passion et à la voix inébranlable de Rebecca. »

Élever les autres

Selon Angela, cette attitude extraordinaire et porteuse de changement était tout simplement caractéristique de Rebecca.

« Sa devise était : « C’est en aidant les autres à s’élever que nous nous élevons nous-mêmes » », explique Angela.

« Elle a fait tout ce qu’elle pouvait pour améliorer la vie des autres. Elle était déterminée. Optimiste. Toujours pleine d’espoir pour trouver un remède. »

Rebecca a certainement permis d’améliorer beaucoup de choses pendant son séjour ici, et elle continue de le faire aujourd’hui. Nous, à la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales, sommes heureux de décerner à Rebecca, à titre posthume, le prix Bénévole de distinction pour la défense des droits, qui reconnaît son incroyable contribution envers la communauté des personnes touchées par une tumeur cérébrale. Grâce à Rebecca, les patients atteints d’une tumeur cérébrale, et tous les patients atteints d’un cancer, partout au Canada, n’auront, espérons-le, pas à vivre les mêmes épreuves qu’elle.

La nature altruiste de Rebecca et son désir de laisser derrière elle un monde meilleur resteront à jamais gravés dans nos mémoires, et nous sommes très honorés d’avoir bénéficié de son soutien indéfectible. Merci, Rebecca, et merci à la famille de Rebecca pour l’influence que vous continuez d’exercer.