Penn la brave
Vous pouvez vivre jusqu’à 99 ans, sans pour autant avoir accompli tout ce qui figurait sur votre liste de souhaits !
« En tant que parents, vous nourrissez des rêves et des aspirations pour vos enfants, qu’il s’agisse d’aller à l’université, de connaître leur premier coup de foudre, de faire du sport ou de voyager », explique Catherine Gulinao.
Issue d’une famille très unie de Calgary, Penn Manabat se savait très aimée par ses tantes, ses oncles, ses grands-parents, sa mère, son père, sa grande sœur Paige et son chien Pepper Potts. Elle avait plus de 20 cousins et cousines.
Penn s’épanouissait à l’école. Elle aimait aussi les pirates, les terrains de jeux, et son animal préféré était le renard. On lui avait donné un renard en peluche quand elle était bébé, qu’elle a appelé « Dox ».
« Elle avait tout simplement beaucoup d’imagination et était une véritable gourmande. Ses aliments préférés étaient la crème glacée, les croissants, le chocolat et les crêpes japonaises appelées Okonomiyaki », se souvient sa mère.
La famille de Penn a veillé à ce que la fillette s’épanouisse pleinement; elle était une enfant de trois ans en santé, intelligente, éloquente et dotée d’une personnalité unique.
« Si elle voyait quelqu’un qui était laissé de côté, elle se tournait vers cette personne pour s’assurer qu’elle savait qu’elle était aimée et non abandonnée », se souvient fièrement Catherine.
« Elle était plus mature que son âge. Même quand elle souffrait énormément, je sais qu’elle pensait beaucoup à maman, papa et Paige. »
Une nuit de février 2021, Penn a commencé à éprouver des douleurs qui l’ont fait crier et pleurer à l’agonie.
« Nous n’avions aucune idée de ce qui se passait. Nous avons supposé que ce devait être des douleurs de croissance. Ma cousine a une fille qui a environ le même âge que Penn, et elle vivait la même chose », raconte Catherine.
« Deux semaines après cela, elle a grandi d’un pouce. On a tout simplement pensé que c’était ça. »
Pendant deux mois, la douleur atroce a cessé. Ce n’est qu’à la fin du mois d’avril qu’elle est revenue. Catherine et Sheldon savaient que quelque chose n’allait pas du tout.
« Nous étions en pleine pandémie de COVID. Un mercredi, nous avons eu un appel téléphonique virtuel avec l’un des médecins des urgences de l’hôpital pour enfants de l’Alberta. Il a évalué Penn et il a jugé son état satisfaisant. Il a ensuite envoyé une demande d’analyse », raconte Catherine.
Deux jours plus tard, tôt le vendredi matin, Penn a de nouveau éprouvé les douleurs extrêmes et sa main droite tremblait légèrement. En raison de ces symptômes, elle devait se rendre à l’hôpital et y passer un scan.
« J’ai su que les nouvelles étaient mauvaises lorsque le médecin a quitté précipitamment la salle de tomodensitométrie avant la fin du long scan », se souvient sa mère.
Une masse importante, de la taille d’une mandarine, a été découverte sur le côté gauche de son cerveau. À part le tremblement, Penn n’avait aucun autre symptôme, comme des nausées, des vomissements, une cécité ou une paralysie, et elle était toujours capable de parler.
Trois jours plus tard, Penn a subi une craniotomie. Elle a fait preuve d’une résilience et d’une force remarquables.
« Elle a fait preuve d’une grande vitalité après son opération du cerveau. Elle était très alerte et était capable de se rappeler ses aliments préférés. Elle a même dit : »Maman, je suis vraiment brave». C’est ainsi que nous avons trouvé le nom de Penn la brave », déclare Catherine.
Après l’opération, Catherine et Sheldon ont reçu la nouvelle que Penn était atteinte d’une tumeur. On pensait à l’origine qu’il s’agissait d’un glioblastome, une forme mortelle de cancer du cerveau.
Toutefois, dans le deuxième rapport de l’hôpital SickKids de Toronto, il a été établi que Penn était atteinte d’un épendymome anaplasique. Bien que ce type de cancer du cerveau soit un gliome de haut grade, le taux de survie est meilleur que celui du glioblastome. Cela a donné de l’espoir à la famille.
« Lorsque les médecins ont décidé qu’ils pouvaient modifier le plan de traitement de Penn pour ne lui administrer que de la radiothérapie, sa tumeur s’est développée à nouveau en six semaines. Elle a dû subir une seconde craniotomie », explique Catherine.
« Elle s’en est sortie de façon incroyable, mais a perdu une grande quantité de sang. Nous apprécions vraiment les donneurs de sang, car Penn n’aurait pas survécu autrement. »
En sept jours, Penn a pu sortir de l’hôpital en marchant. Trois jours plus tard, elle a commencé ses traitements de radiothérapie.
« Elle s’en est bien sortie jusqu’au 8 mars 2022 – Journée internationale des femmes – date à laquelle son IRM de routine a révélé une récidive du cancer. Ce dernier s’était propagé dans tout son cerveau, y compris dans sa colonne vertébrale », se souvient sa mère.
Tout au long de ses traitements contre le cancer, Penn a subi des IRM de routine qui nécessitaient l’administration de sédatifs, deux craniotomies invasives, 33 traitements de radiothérapie épuisants, ainsi que trois cycles de chimiothérapie palliative.
Pendant la période d’attente précédant l’établissement du diagnostic, la famille s’est sentie isolée, car elle ne connaissait pas d’autres familles ou patients touchés par le cancer. Catherine et Sheldon n’ont pas pu rencontrer d’autres parents lorsque leur fille suivait un traitement.
Un programme spécifique de « procédure d’entrée et de sortie » a été mis en place, afin d’éviter de croiser toute personne susceptible d’être infectée par le coronavirus.
« Au moment où elle a reçu son diagnostic, ce n’était même pas possible. C’était très difficile pour nous, car Penn ne connaissait personne d’autre qui avait un parcours similaire au sien », explique Catherine.
« Nous sommes une équipe ! » — Penn Eloise Manabat
À la fin des années 1970 et au début des années 1980, les parents de Catherine et Sheldon ont immigré des Philippines à Calgary.
En effectuant les premières recherches sur l’état de Penn, la famille a constaté que les personnes de couleur racontant leurs expériences étaient peu nombreuses.
« Le cancer ne fait pas de distinction d’âge, de sexe ou de race. Il est important que les familles de toutes origines sachent qu’elles ne sont pas seules », plaide Catherine.
Elle espère que d’autres enfants pourront entrer en contact avec des personnes avec lesquelles ils ont des points communs, ce qui pourrait les soutenir tout au long de leur parcours personnel.
Du pronostic du cancer de leur fille à l’obtention d’une deuxième opinion, Sheldon et Catherine étaient déterminés à apprendre tout ce qu’ils pouvaient. Ils ont découvert la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales lors du premier diagnostic de Penn.
« C’était tellement frustrant de savoir qu’il y avait eu des avancées dans les cancers chez les adultes, mais pas dans le monde pédiatrique », déclare Catherine.
Les parents de Penn ont fait preuve de transparence quant à l’expérience et au traitement de leur fille. Ils se sont assurés de répondre à toutes les questions que Penn avait au sujet de sa maladie. Elle était très consciente de ce qui lui arrivait et elle avait perdu les trois quarts de ses cheveux.
Mais avant tout, ils ont fait en sorte qu’elle ne se sente jamais seule.
« Nous ne voulions pas lui cacher la réalité à laquelle elle était confrontée. Sheldon et moi avons eu des conversations avec elle sur ce qui pourrait se passer lorsqu’elle irait à l’école. Par exemple, les enfants pourraient lui demander pourquoi elle était chauve », explique Catherine.
Catherine est reconnaissante du soutien qu’elle et Sheldon ont reçu de la part de leurs employeurs.
« Ce n’est pas tout le monde qui a le privilège de prendre des jours de congé. Chaque jour était un cadeau, car nous ne savions pas combien de temps il nous restait avec elle », dit Catherine.
On a informé la famille que le cancer avait récidivé et qu’il n’y avait pas d’autres options de traitement disponibles, à l’exception de la chimio palliative. Sheldon et Catherine ont choisi le témozolomide parce qu’il pouvait être administré à la maison et qu’ils voulaient qu’elle soit aussi bien que possible. Ils sont très reconnaissants envers l’équipe extraordinaire de l’Alberta Children’s Hospital.
« Je suis brave » — Penn Eloise Manabat
« Je suis brave », disait-elle plusieurs fois au cours de ses différents traitements. « Je suis vraiment brave, maman – ou je suis vraiment brave, papa », se souvient Catherine avec tendresse.
Penn a créé sa propre liste de souhaits, ce qui a rendu ses parents extrêmement fiers. Après ses traitements de radiothérapie, elle se rendait chez le marchand de crème glacée local ou dégustait des pâtisseries.
Malgré son immunodépression causée par ses traitements, Penn a pu réaliser ses derniers souhaits : voir Cendrillon à Disney World et observer avec émerveillement les baleines nageant dans l’océan.
« Ce n’était plus à propos de nous, et nous lui avons demandé ce qu’elle voulait faire. Elle nous l’a dit, et nous l’avons écrit. Certains d’entre eux étaient simples. Je veux aller à l’aire de jeux tous les jours, je veux jeter des pierres dans la rivière et aller camper », raconte sa mère.
Penn a toujours aimé la crème glacée à la « gomme balloune », mais il n’y en avait jamais dans son magasin préféré. La famille a communiqué avec Made by Marcus, une chaîne locale de crème glacée de Calgary. Ils ont créé la crème glacée Penn’s Bubble Gum, dont tous les profits sont versés à la recherche sur le cancer du cerveau.
En partenariat avec la Fondation Made by Marcus, la famille de Penn a récolté plus de mille dollars. Catherine a donné les fonds à la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales.
« Nous lui avons toujours dit : «Tu es toujours dans notre cœur». Quand elle ne pouvait plus parler, elle mettait toujours sa main sur son cœur », se souvient-elle avec amour.
Malheureusement, l’état de Penn s’est considérablement détérioré. Elle a progressivement cessé de marcher, de parler et d’avaler. Elle est décédée le 21 juin 2022.
La famille prend parfois les choses une minute à la fois. Paige adore regarder des vidéos et des photos de leurs moments passés ensemble.
« C’est une façon pour elle d’être à ce moment-là avec sa sœur, ce qui la rend heureuse. Nous devons comprendre que chacun vit son deuil différemment. Nous avons reconnu et respecté nos différentes formes de deuil. Soyez bienveillant envers vous-même. Même si vous ne pouvez manger que deux craquelins et prendre une douche, vous vous êtes quand même donné à 100 % parce que c’est tout ce que vous pouvez donner. Demain est un autre jour », encourage Catherine.
En dépit d’une fin qui n’est pas celle qu’ils avaient souhaitée, sa famille garde l’espoir qu’un remède contre le cancer du cerveau sera éventuellement découvert.
Bien que Penn ne puisse pas être là physiquement, elle est encore capable de toucher des vies chaque jour, à sa manière. Depuis sa mort, Penn guide sa famille vers des endroits. Pour eux, c’est un signe qu’elle veut qu’ils aillent de l’avant.
« Il s’agit d’être fidèle à Penn et de se rappeler qu’on fait tout cela pour elle. C’est pour perpétuer son héritage. Elle a été capable d’accomplir tant de choses et de toucher la vie de tant de gens en si peu de temps. Je pense que c’est l’une des nombreuses choses pour lesquelles on se souviendra d’elle », déclare Catherine.
Au nom de la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales et de la communauté des personnes touchées par une tumeur cérébrale,
Merci à l’équipe « Penn la brave » !